Un skipper montluçonnais en quarantaine en Croatie : « Tout est fait pour qu'on l'attrape ici »
En quittant le port de La Rochelle, le 20 février dernier, pour convoyer un catamaran de tourisme en Croatie, Ludovic Morin, était loin d’imaginer qu’il terminerait son trajet, vingt-cinq jours plus tard, en quarantaine.
Depuis le dimanche 15 mars, le Montluçonnais d’origine et son compagnon de route sont bloqués, chacun dans une chambre d’un hôtel de Split réquisitionnée par le gouvernement croate.
« En théorie, on est là pour une durée de quatorze jours, mais on a peur qu’à notre sortie, il soit impossible de trouver un avion pour rentrer », souffle le skipper professionnel de 43 ans, installé sur l’Île de Ré depuis une quinzaine d’années.
« Traités comme des malfaiteurs par les policiers »La galère des deux marins a débuté « à un moment où on était loin des mesures de confinement actuelles ». Mandatés par un armateur charentais pour livrer un catamaran de tourisme de 12x7 mètres en Croatie, ils quittent le port de La Rochelle, le 20 février.
Après plusieurs courtes escales à La Corogne, Cascais, Gibraltar, Carthagène, Majorque, puis Lipari, « soit pour des compléments de gazole, soit parce que les conditions météos étaient mauvaises », Ludovic Morin et son collègue skipper tentent d’accoster à Dubrovnic, où l’accès leur est refusé.
Après une deuxième tentative infructueuse dans un autre port, l’ambassade de France obtient, finalement, leur entrée dans le port de Split. « On a voulu dédouaner le bateau et à partir de là, tout a basculé », raconte Ludovic Morin.
Les deux hommes sont alors escortés par la police « comme des délinquants ou des malfaiteurs » vers l’hôtel où ils sont depuis bloqués.
Après avoir essuyé des refus d'accoster dans deux ports, les deux skippers ont finalement pu amarrer le catamaran qu'ils convoyaient dans le port de Split.
On nous a aussitôt soupçonnés d’être porteurs du Covid-19 et d’avoir été en contact avec des personnes italiennes. Ce qui est complètement faux. Quand on a fait escale à Lipari, le 11 mars, on n’a eu aucun contact avec qui que ce soit. On portait masques et gants et eux aussi. Et personne ne s’est touché ou approché à moins d’un mètre…
« Refoulés » à l'aéroport« On est juste sorti, mardi, après avoir réussi à trouver un avion, mais on a été refoulé », lâche Ludovic Morin, qui se débat aussi avec l’armateur du bateau. « Contractuellement, c’est à lui de nous rapatrier, mais il fait la sourde oreille. »
Une vue du couloir de l'hôtel où Ludovic Morin est en quarantaine. "On ne voit personne. On nous pose de la nourriture immangeable sur des tables dans le couloir."
Toujours en contact avec l’ambassade pour tenter de débloquer sa situation, le Montluçonnais s’est aussi attaché les services d’une avocate. « Moralement, ça va. »
Hôtel « miteux », nourriture « immangeable »Dans sa voix, une colère froide transpire : « On est bloqué dans notre chambre. On ne voit personne. On nous pose de la nourriture immangeable sur des tables dans le couloir. L’hôtel est dans un état miteux, avec des moquettes sales. On a pris toutes les précautions pendant notre voyage et tout est fait pour qu’on l’attrape ici... »
Michaël Nicolas