La retraite du médecin de Montaigut fragilise encore l'offre médicale dans le bassin de Saint-Eloy
Exerçant à Montaigut depuis février 1988, le docteur Pierre Cadez partira à la retraite à la fin du mois de juin, à l’âge de 65 ans. « Il faut savoir s’arrêter un jour, assure-t-il. L’année de trop, ça peut être catastrophique. »
Dans quelques semaines, le 28 juin très précisément, le docteur Pierre Cadez ne finira pas sa journée comme d’habitude. Ce jour-là, après avoir salué son dernier patient, dans son cabinet de Montaigut, il tournera définitivement la page de sa carrière professionnelle. Place, désormais, à la retraite.
« J’ai beaucoup, beaucoup, beaucoup travaillé. J’ai eu la chance d’avoir une santé qui m’a servi. J’ai fait le job », sourit cet homme affable et plein d’énergie. À 65 ans, il ne veut pas manquer son rendez-vous avec le temps enfin libre. « Il faut savoir s’arrêter un jour. L’année de trop, ça peut être catastrophique. Si on veut faire autre chose, c’est le moment ou jamais. »
Au hasard d’un remplacementIl y a 36 ans qu’il est arrivé dans cette commune du nord des Combrailles, presque par hasard. C’était pour un remplacement de huit jours.
« Montaigut, je ne savais pas où c’était. »
Le médecin qu’il remplace alors est sérieusement malade. Au bout d’un an, il décède. Pierre Cadez rachète le cabinet et la patientèle, ainsi que la maison attenante. Il s’y installe avec Pascale, son épouse, et leur premier enfant, encore tout jeune.
Commence alors une carrière qui, par certains aspects, ressemble à un marathon couru à la vitesse d’un 100 mètres. C’est la vie d’un médecin de campagne. « Le fait de travailler seul présente des avantages, mais aussi des inconvénients. Ce qui n’est pas bien, c’est qu’on ne peut pas demander de coup de main à un collègue », estime-t-il.
Médecin traitant de 3.000 patients !Ces dernières années, un certain nombre d’améliorations sont intervenues, que ce soit pour les gardes et la collaboration avec le Samu, ou pour la prise des rendez-vous. Mais le manque de confrères dans le secteur pèse lourdement. Certains jours, il reçoit près de 70 patients, sur des amplitudes horaires très importantes, parfois 12 heures par jour ! Et il est le médecin traitant de quelque 3.000 personnes.
Lorsqu’il s’est installé, en 1989, dix médecins exerçaient encore sur le canton. Aujourd’hui, ils ne sont plus que quatre. Dont deux qui ne sont pas à temps complet !
Aucun repreneur ne se manifesteLe départ à la retraite de Pierre Cadez va donc tendre encore un peu plus la situation localement. Aucun successeur potentiel ne s’est présenté pour s’installer à Montaigut.
« Nous avons passé une annonce sur un site professionnel, nous avons été aidés par la communauté de communes. Ça fait un an qu’on a fait tout ça. Nous n’avons eu aucun appel. Zéro ! »
Mais « les jeunes », comme dit Pierre Cadez, souhaitent travailler d’une autre manière. Il fait ce constat sans aucune amertume. « Je les comprends. Ils ont envie d’avoir une vie de famille et des vacances. Pourquoi devraient-ils être les seuls à travailler comme des bœufs ? », interroge-t-il. Salariat, maison de santé… Les formules existent aujourd’hui, même si elles sont parfois difficiles à mettre en œuvre.
Avec la retraite de Pierre Cadez, une page se tourne à Montaigut. Jean-Marc Sauterau, le maire de la commune, mesure bien le vide que ce départ va laisser à Montaigut. « Pour le coin, c’est dramatique », souffle l’élu. Il n’est jamais à court d’arguments pour plaider l’intérêt, pour un jeune médecin, de s’installer à Montaigut. Mais personne, vraisemblablement, n’y a été sensible. « Qu’est-ce qu’il faut faire ? Si on avait une baguette magique… »
Jean-Baptiste Ledys