C’est son patron Elon Musk qui l’a annoncé en personne, dans un email envoyé à ses salariés. Le géant de l’automobile électrique Tesla va supprimer "plus de 10 %" de ses effectifs à travers le monde, soit un total de plus de 14 000 emplois.

Dans son courrier, le dirigeant américain explique que Tesla "a grandi rapidement" ces dernières années, croissance qui a créé des "doublons […] dans certaines activités", selon lui. Elon Musk indique que le constructeur "se prépare pour sa prochaine phase de croissance" et cherche, ce faisant, à réaliser des "économies de coûts" et des "gains de productivité". "Nous avons effectué une analyse approfondie et pris la décision de réduire nos effectifs de plus de 10 % au niveau mondial", a indiqué l’entrepreneur.

Dans son dernier rapport annuel, Tesla indiquait compter, fin décembre, environ 140 000 salariés, ce qui signifie que le constructeur va se séparer d’au moins 14 000 employés. Sollicité par l’AFP, Tesla n’a pas donné suite dans l’immédiat. "Il n’y a rien que je déteste davantage" que de procéder à des licenciements, "mais il faut en passer par là", a écrit Elon Musk. "Cela va nous amincir, nous rendre plus innovants et mobilisés pour notre prochain cycle de croissance". La dernière coupe majeure dans les effectifs de Tesla remontait au milieu de l’année 2022, où le constructeur avait là aussi renvoyé 10 % de ses salariés.

Chute des livraisons en début d’année

Après des années de succès, le constructeur automobile américain connaît une période plus délicate. Il a cédé au chinois BYD la place de premier constructeur mondial de véhicules électriques au dernier trimestre 2023. De manière générale, Tesla, qui s’est positionné depuis l’origine plutôt dans le haut de gamme, souffre de la concurrence des voitures chinoises aux prix très bas.

Ce début d’année 2024 a confirmé cette mauvaise passe pour le constructeur américain, qui a vendu beaucoup moins de voitures que prévu. Ainsi, les livraisons de Tesla au premier trimestre se sont portées à 386 810 véhicules au total, contre les 457 000 attendus par le consensus des analystes. Une nette baisse également par rapport au premier trimestre 2023, où Tesla avait livré livré un peu plus de 422 800 voitures (-8,5 %). Sa production a également reculé, à 433 371 véhicules (-8,5 %).

Pour revenir à ces niveaux de livraisons, il faut remonter à l’année 2022, où la production avait été largement affectée par le Covid et les périodes de confinement très strictes en Chine, là où sont produites un grand nombre des voitures de Tesla. "Les livraisons du premier trimestre ont été un cauchemar, avec la demande chinoise et mondiale de voitures électriques qui fléchit", ont estimé les analystes de Wedbush Securities. "Tesla est coincé entre deux vagues de croissance et la patience des investisseurs commence à s’éroder", ont-ils ajouté.

Un contexte difficile pour toute la filière électrique

Mais plus largement, c’est toute la filière de la voiture électrique qui se trouve en difficulté. Le constructeur chinois BYD, le concurrent numéro 1 de Tesla, n’a livré que 300 114 véhicules électriques à batterie au premier trimestre, soit une baisse de 43 % par rapport aux trois derniers mois de l’année dernière. La filiale électrique de Renault, Ampere, a de son côté décidé d’annuler son entrée en Bourse au début de l’année 2024, principalement en raison des "conditions de marché actuelles". La faute à une demande en berne liées à des prix toujours de vente élevés, des difficultés d’accès aux bornes de recharge toujours importantes, ou encore des baisses de subventions publiques pour la filière.

Selon le média américain Bloomberg, cette période difficile était d’ailleurs anticipée au sein de Tesla, qui laissait comprendre depuis le début de 2024 de cette réduction d’effectifs à venir. Les managers du constructeur s’étaient ainsi vu demander de justifier que le poste de chacun de leurs employés était indispensable. Certains salariés avaient également appris à la fin de l’année dernière que l’entreprise n’offrirait plus de primes au mérite dans le cadre de l’évaluation annuelle des performances. "Nous devons simplement rechercher chaque centime possible", avait expliqué le directeur financier du constructeur Vaibhav Taneja lors de la dernière conférence téléphonique sur les résultats de Tesla, le 24 janvier.

En outre, dans son communiqué annonçant ses résultats pour le premier trimestre 2024, Tesla a mis en avant les "arrêts d’usine résultant de détournements de navires causés par le conflit de la mer Rouge", mais aussi "un incendie criminel à la gigafactory de Berlin" comme facteurs ayant également causé cette baisse des livraisons.

Mais c’est plus largement un nouveau tournant qui semble s’opérer pour Tesla. Toujours ce lundi, le vice-président du constructeur, Drew Baglino, a annoncé son départ sur X, alors qu’il était l’un des visages les plus connus du constructeur, où il aura passé 18 ans. Toujours selon Bloomberg, un autre vice-président, Rohan Patel, va également quitter l’entreprise. Mais au centre du jeu, encore et toujours Elon Musk, engagé sur tous les fronts, de SpaceX à Neuralink, en passant par Tesla, et évidemment X (ex-Twitter).