Viacom confirme sa position de faiblesse avant l'éventuelle fusion avec CBS
Le groupe de médias américain Viacom, à l'avenir toujours incertain après une année d'intense lutte de pouvoir, a de nouveau publié mercredi des résultats en forte baisse, confirmant sa position de faiblesse dans les négociations en vue d'un possible mariage avec CBS.
Viacom est plombé par une accumulation de pertes chez ses studios de cinéma Paramount, qui viennent encore de faire un flop aux Etats-Unis avec "Ben Hur", et des difficultés persistantes chez ses chaînes de télévision (MTV, Nickelodeon, Comedy Central) souffrant de la concurrence de la vidéo en ligne et de recettes publicitaires en berne.
Sur l'ensemble de l'exercice décalé clos fin septembre, le chiffre d'affaires de l'ensemble du groupe a baissé de 6% à 12,488 milliards de dollars et le bénéfice net de 25% à 1,436 milliard.
Au seul quatrième trimestre, le bénéfice net a chuté de 71% à 252 millions de dollars, et le chiffre d'affaires de 15% à 3,226 milliards, là où le marché attendait 3,3 milliards.
Par secteur d'activité, les réseaux de télévision ont vu leur bénéfice d'exploitation reculer de 27% à 750 millions de dollars sur le trimestre alors que les studios de cinéma ont accusé une perte d'exploitation de 137 millions de dollars.
L'avenir de Paramount, et notamment un projet depuis abandonné pour en céder une partie, était l'un des enjeux d'une crise de pouvoir dont Viacom sort tout juste, et qui s'était soldée cette été avec la démission du PDG Philippe Dauman et une reprise en main par le grand actionnaire, la famille Redstone.
La direction générale a depuis été confiée provisoirement au directeur d'exploitation, Tom Dooley, qui cèdera à son tour la place la semaine prochaine, mais toujours à titre intérimaire, à Robert Bakish, le patron des activités de télévision à l'international.
Shari Redstone et son père Sumner, qui contrôlent la majorité du capital de Viacom comme de CBS, ont en effet demandé aux deux groupes de réfléchir à une fusion.
Un comité spécial du conseil d'administration de Viacom "continue de travailler avec ses conseillers financiers et juridiques pour explorer les avantages d'un rapprochement", s'est contenté d'indiquer mercredi Tom Dooley, sans donner de détails sur l'avancée de la procédure.
- CBS se fait prier -
"Nous sommes encore à un stade très précoce" et "le calendrier et le résultat sont incertains", avait indiqué de son côté la semaine dernière Leslie Moonves, le PDG de CBS. Et de réaffirmer qu'il n'accepterait une transaction que si elle était "dans le meilleur intérêt de CBS et de tous ses actionnaires", y compris donc les investisseurs minoritaires indépendants des Redstone.
"Si (...) c'est structuré correctement, ça pourrait être une opportunité attractive. Sinon, nous sommes très enthousiastes sur nos perspectives tout seuls", avait-il insisté.
Leslie Moonves, considéré comme favori pour prendre la tête d'une éventuelle entité fusionnée, a, bien plus que Viacom, les moyens de se faire prier: il s'exprimait alors que CBS venait de dévoiler un chiffre d'affaires trimestriel en hausse de 4%, tandis que le bénéfice net a grimpé de 12%.
Bob Bakish a souligné mercredi qu'en attendant que la question du mariage soit tranché, il était là pour "maximiser le potentiel de Viacom en tant qu'entreprise indépendante".
Il a notamment expliqué vouloir s'inspirer de ses réussites à l'international pour chercher à "renforcer MTV, Comedy Central et Paramount", disant entre autres vouloir réorienter les investissements vers les contenus.
"On dirait qu'il y a un plan B" et "que la direction a un mandat crédible si en fin de compte Viacom reste indépendant", a commenté la banque Jefferies dans une note.
Plus sceptiques, les analystes de Loop Capital Market ont relevé un ton "généralement morose" dans les commentaires de la direction de Viacom.
"On pouvait sentir la tension", ont-ils noté, rappelant que si le marché a "l'espoir que CBS vienne d'une manière ou d'une autre à la rescousse", le groupe de Leslie Moonves "n'a absolument aucune obligation de le faire", tandis que les Redstone et leurs associés ont accepté de rester à l'écart des discussions afin d'éviter les accusations de conflit d'intérêt".